Cœurs Vaillants 1941
Au Docteur de l'lshe, qui réalisa u qui est ra– conté dans cettl! histoire. D éccmbre 1940... Lo tempête faisait rage. Lo neige tourbdlonnoit sans arrêt depuis des he ures. Volets clos, silencieuses sous les rafales, les maisons se tossaient, à demi ensevelies sous l'épaisse couche blanche que le vent des Alpes occumul'oit en masses énormes. La porte de Io demeure du docte ur Ne rval, de G..., s'ouvrit brusquement e t le médecin, entrant d'un geste vif chez lui, referma Io porte et secoua ses vê tements. - • C'est toi, Henri ? • appela une voix de femme. - c Oui, c'est moi... Ouf ! quel temps, Seigne ur ! j'en ai rarement vu de pare il. J'ai dû mettre un quart d 'h eure pour foire les 1 OO mètres qui nous séparent de Io clinique. M'a -t-on a ppelé en mon absenee ? • - • Non, par bonheur, dit Madame Nerval. 'il te fallait sortir p ar un tel t e mps, je se rais ~rriblement inquièt e ... - • Et les enfants ? • - • Ils von t bien ; je les toisais travailler a u moment où tu e ntrais • . A ce moment . le sonne rie du té lé phone re– tentit. - c Veux-tu pre ndre Io communication e n a t tendant que je sois prêt ? demanda le d octeur Nerval à 60 femme. Celle-ci décrocha l'écouteur : - • Alla... Oui, c'est b ie n chez le docteur Ne rva l... Il vient de re ntrer à l' instant mê me... Un accident ? D'où té léphone z-vous ? De La Se rraz ?... Bie n, mois comment est le mo~ade ? Attendez, je vous passe le Docteur... , . Aux pre mie rs mots prononcés par sa fe mme , le Docteur ve nait de s 'avancer rapide me nt vers l'a ppareil qu'il pri t e n main ; so voix calme et g ra ve con tinuo l'interrogatoire : . . • Ici, Je docteur Nerval. .. Où s'est passé l'accident ? A Io fe rme d es Mouche t ? Be n, je vois.. Qu'y a-t- il e u? Une jambe broyée sous un fayard ?... L'a- t -on ram e né chez lui ? Bie n... Beaucoup de sang ?... Parle-t- il ?... Très pôle ?... Qui est avec lui ? Seule me nt sa femme e t sa fille ? Et vous ?... Ce rt a ine me nt, il faut que je m 'y re nde... Entendu, attendez- moi pour me g uider à partir du col... >. Madame Ne rval a vait tressailli en entendant ces paroles, mois domptant son onqoisse, elle commença à p ré pare r hâtivement les habits de mor.toqne de son m ari, tondis que ce de rnie r p rc rioil le;, d e rniè res p récisions. - • Quel temps fait-il là -haut ? Le chemin ex iste- t -il tou1ours ? Il m e foudre bie n d eu x he ures.. Oui, je serai à sk is... J 'aime aut ant.. Ve nez donc d q ns deu x h eures e nviron au-de vant de moi. Je pars dans cinq minutes... A to ut à l'he u re ... >. L'app a re il raccroch é, le Docteur se t o urna vers sa femm e : • • c Tu pars ? :1 d emanda ce lle -ci. . . •· Bien StJ" ré pondi t le Docteur ; une ja m be broyée, une for te h é mo rrag ie. Il ne fout pas attend re. J'irai à skis. Sois tranquille, je se ra i p rude nt... ., . Passe nt rapid e me nt dons son cabine t d e travail, le Docteur vé rifia sa trousse, p uis, se ravisa nt ou m oment d e Io fe rme r, il y a jo uta une petite pompe asp irante et foulante en ve rre, à la quelle éta ien t adaptés de•Jx tubes de caoutchouc qu'il !)rit dons une a rmoire vitrée . - • C'est p lus p rudent, m u rmuro- t- il. S' il a perdu tant d e sa ng , il faudra foire peu t - ê tre une transfusion. Et maint e nant, en route ! , _ Dons le corridor, où sa femme l'attendait, les sk is à te r 1 re, le docte u r Ne rval mit sa sacoche dons son so c de montagne qu'il fixa à ses é pa ules. - • J'ai mis d edans, e xpliq ua hâtive me nt sa femme, un flocon de cog na c, quelques sand– wiches e t a utres p rov isions... Voici tes gants, un coche-nez ; fixe b ien ta veste de cuir, le vent est terrib le ... • . Méthodique me nt, l'ho mme s'équipait. Il chaus – sa ses skis, qu'il a ssu ra bien à ses pieds, m it ses moufles e t, embrassant sa femme : - ci: M e voilà paré, dit- iJ a vec e ntrain ; pas d' in quiétude ; je t61ép h one rai dès mon arrivée, si les fils ne sont pas brisés. Au re voir ! ., Ouvrant la porte de Io rue, qui laissa passe r un V•Olent tourbi llo n d e neiçl'e e t d e ve nt, le docteur Nerval s'é lança d e hors e t disparut. Si Io tempête é tait violente dons le bourg, une fois hors des moisons, c'é tait bie n outre chose. Le vent soufflait avec une t elle force que Je Docteur devait, par mome nts, se coucher sur le côté, ore-bouté solidement sur ses b â tons, pour résister à l'ouragan. Et Io neige, 1oujours, tourbillonnait. Venait-elle du ciel ? ou da Io terre, soulevée par le vent ? On ne savait le dire, mois elle aveuglait le voyage ur et, bien e ntendu, nulle route n'était vis ible. Seuls, les poteauX' téléphoniques montraient le chemin et c'est sur eux que se fiait le Docte ur. t entemf!nt, il s'élevait vers le col, profitant d es bouquets d 'arbres pour repre ndre souffle. Près d e deux heures s'étaient écoulées, quand il lui serr" lo e ntendre un oppeL 11. s'arrêta, écouta avec soin, puis répondit de toute Io farce de ses poumons. Peu après, dons une rafale de ne ige, un homme g lissa jusqu'à Jui : - « Ah ! Docteur, je craignais que vous ne soyez enseveli sous Io neige... C'est bien à . vous d'être venu. Ço va ? •. - • A peu près... 11 est dur d e garder Io route. Suis-je loin du col ? - c Dons une demi-heure nous y ~, vous déviez un peu. Suivez~moi • . Sur les pas de son guide, le docteur Nerval pénétrait, quelque t emps plus tord, dons Io cuisin e du café bâti au col mêm e a vant Io Se rraz. Plusieurs hommes s'y trouvo:ent a ssem– blés dans une âcre atmosph ère su rchargée de fumée. Ils firent place à l'arrivant : - ·Bonsoir, avait dit le guide, voici le Doc– teur > , mois rcmorQuant Io mine inqu iète des hommes, il a jou ta L e doc/eul' pril m71idemen1 l'n11vareil conlinttanl l'rntel'roqatnire... aussi Qu'y a - t- il ? •. L'un des monta– gnards répondit : - • Lo tempê– te a abattu des arbres s ur la route, les f ils sont coupés e t d'autre s arbre s sont t ombés sur Io ferme des Vereing. J e suis venu cher– che r de l'a ide pour répare r les dégâts e t d égager les bê– t es >. Se t o urnant vers le Docte ur qui souf– flait un peu près du feu, son guide dem anda : · - • Il y curait bien besoin de ma i ici, Docteur je pensais vous occom – pQgnc r. Pouvez- vous vous passer de moi ? - c Oui, le plus dur est fait ; mie ux vau t ré pare r Jes fils. Je continue seul ; dè s Que Io communication sera ré tablie, prévene z chez moi que cela va bien. Bon co ura ge ! , . Tendant un verre plein de vin blanc chaud, l'un des hommes d it : Buvez chaud, Docte u r, vous en avez besoin ,_ - • Mo foi, j'accep t e. A tout à l'he ure... • . Et c'est de nouveau Jo montée dans le vent, sous les hauts sapins qui g émissen t dons les rafales, mois tiennent bon, protéÇ;eont Io marche... • Le Docteur es t arrivé chez les Mouche t. Dé– chaussant ses skis, il est entré dons la se lla, tandis que la fe mme du blessé lui résu me l'occi– dent. Mal éclairé par une lampe de secours, le Docte ur examine le ma lade . A u pre mier coup d 'œil, il fai t Io moue. Le visage pôle, les traits tirés, Io respiration halet ante ne présage nt rien de bon. Il découvre Io jambe broyé e. Un bandeau comprime le haut de Io c uisse. Il a pe rdu du sang ? • . Be aucoup, Docteur. Ça n'e n finissa it plus d e couJer. J'ai serré ici pour a rrê t e r... >. Vous ê tes seule pour le soig ner ? • . - c J'ai ma fille a vec m oi. A t outes· deux, :ious avons tiré le pè re jusque là e t Io petite est allée pré venir au col... Le Docteur je ta un coup d 'oeil su r Io fille du blessé, âgée d'e nviron 15 a ns. - c Bien, Mqdame ..., il sera absolume nt né– cessaire de descendre votre ma ri dès que Io t empê te le perme ttra. En attendant, je vois le soute nir a vec des p iqûres, mois il a le cœ ur si faible que je crains Io g rond e pe rte de sang. SPORTIFS ... un grand concours ! Petit . . ascension Bientôt Mais malade , En besoin loin, 111111111111111111111111111111111111111111111111111111111111111111111111111111111111· avec somme t . ét;:ip e, Même tu aide r. Il va vous la nce r avec le s a lpinistes qui font notre g rande ascensio n à la re che rche d'un m essage que le ur g uide le ur a laissé pour vous et qu'ils n'ont p a s s u d écouvrir. Un indiscre t m'a dit qu'il se cacha it à tra vers les colonnes de ce numéro. R egar– d e z bien. :. Des mots ont é té s oulig n és qu'il s 'agit d e re m e ttre à le ur p la ce s ur le m e s– sa~e ci-d essous . Dès que vous y serez parve nus, envoye z– nous votre . ré ponse (a dre sse : R éd a ction C œ urs Vaillants. Concours du message , 16, rue Nicola!. Lyon-7• ) en joigna nt 1 ti mbre à 1fra nc. Toules le• r~ponu• ju•I~• u ronl récom– pen•!e• e t le s prix serviront p récisém e nt à re mporte r d e m a gnifiqu e 11 p e r forma n c es d a n s les p roc h a ines é ta p es. L'AVENTURE FANTASTIQUE D'UN GÀRS ...------- ------- - DE 12 ANs Il ne se doutait d . ' e rien ... . Francis était tout simplement un garçon comme les autres. IJ ne se doutait do rie n. • - Le matin, il se levait sons trop sa presser, se d.2borbouilloit sons trop se mouiller, mangeait sa soupe parce qu'il n'y avoit plus de café au lait, et s'en allait à l'école après avoir dit plus ou moins machinalement : .. Au revoir, m'mon ·•· Il faisait sonner ses billes dons ses poches, arrivait en classe où il écoutait d'une oreille souvent distraite les explications de Monsieur Népomus sur· Io dix-millionième partie du quart du mé ridien te rrestre, e t il attendait l'heure de la • récré " pour se jeter dons une formidable partie de balle ou chasse ur ou échanger un a 25 centimes bleu Aviation du Moroc "· Le soir, les devoir:> et les leçons le menaient jusqu'au moment redouté où papa rentre de · l'usine Durand e t Pomme, met ses pantoufles et demande : • Francis. fais-moi voir ton cahier... Et tous les jours, c'était un peu comme ça. Vraime nt rien d'extraordinaire '! . • Et puis,. une fois, !'Aventure est arrivée 1 Tout d'un coup, sans cric.r gare. F1·onots, qui avait quarante sou! dans sa poche parce qu'il était deuxiè me sur 45 au classeme nt mensuel de janvier, C!Sf tout si"1plcment passé de vant le kiosque à journaux de la place de la Mairie. 11 a vu un illustré aux couleurs vives, et il l'a ache té parce qu'il y avait sur la première page une histoirc de panthères, de rapides et de pirog_ues. Il s'est emballé pour l'histoire da Jim Boum e t il s'est demandé cc quo peut bien é tre le secret des rayons W-Z. Et puis, sur Io foi d'un petit a rticle mysté rieux qui disait qu'on pouvait faire plus fort que Jim Boum, il s'est décidé à é crire à Jean Vaillant. • Et alors, il a reçu, avec une lettre, un formidable petit livre en couleurs qu'il a déjà relu sept fois. Il a appris qu' il y avait à travers notre poys des millie rs e t des millie rs de petits gars qui éta ient décidés à rendre le monde plus heureux et à rcfai;c la France plus belle. fi a appris qu'il faisait part ie d'une immense arméo de 400 millions d'hommes. 11 a même appris qu'il pouvait devenir un jour CHEF D'EQUIPE dans cette armée. Il ne savait pas. tout ça. 11 s'est dit : • C'est formidable, c'est choue tte, c'est bath ! • . ~t le soir, maman, qui reprisait fes chaussettes de Froncis, l'a antcndu qui murmurait dons son lit : a DU... CRAN... DU... CRAN... ~. Ça y est, Froncis est parti pour l'aventure f Je suis sûr qu'il y aura cette semaine des quantités de Froncis, de Poul e t do Jacques qui m'é criront. Ensemble, nous allons... mois je garde- ça pour eux sons ça ils ne m'éc riront pas. Jean VA ILLANT. Petit frère , si tu veux , toi aussi, connaître les seere rs du livre formidable a ui a e nthousiasmé Francis .. ~à Jean VAILLANT, 16, Rue Nicolai, LYON-7°. en joignant 2 fr. sÔ en timbres à ta le ttre. ·::::· Tu recevras A TOUS LES GARS QUI ONT DU CRAN et tu m 'en diras tout de suiie : d es nouvellês . 11 n 'y o pe rsonne d 'autre que vous d eux à pro ximité ? • . - • Non, Docte ur, personne ... Pourq uoi foi-. re ? • . - • li est urge nt de foire à votre mari u ne trans fusion de sang. Il faudrait que lqu'un Qui pût donner son sang... • . - c Moi? ». - c Vous ê tes déjà épuis~e oor le trovoil e t vous aurez besoin de t outes vos forces pour soigner votre mari. Par ailleurs, il faut foire vite... >. Pe nché sur le blessé qui semble inconscien t, le Cocte ur réfléch it, le p a iqne t de l'homme dans sa main. Soud ain, il se 1dve e t, d'un geste vif, e nlè ve son veston : - • Que faites-vous ? • denlanda Io femme. Sans répondre d irectement, le Docteur ques– tionna : - • Vous a vez une servie tte propre ? Bon, me tte z- Io sur la table ... Avez-vous un réchaud à a lcool ?... Faites donc bouillir un peu d 'equ •. Ce disent, il re le vait la manche de sa che– m ise, découvrant le bras gauche : - c Ma is vous n'aJlez pas donner votre sang vot.ts -mê me ? ~ s'écria la ferm ière toute émue. - c Si, Madame, je vous l'ai d it, il faut faire vite ... •. Mais ma filie peut aller che rcher un homme au col,.. -. . - • Il arrive rait trop tord et peut-ê tre son sang ne se rait - il. pas bon. Je su is un • d onne ur unive rsel >, donc je puis utiliser le m ien . Vite, ou travail. . Vous m'a ide rc t .. Courbé su r le lit du blessé, le Doct eur décou– vre le bras g a uche, il che rche la veine ou coude, p asse un tube de coo•Jtchouc q u'il serre autour du bras, au-dessus du cou de, pour foire g on fler la veine ; p uis, de ~a trousse ouve rte, il tire une a igu ille e t l'enfonce avec précision dons la v-elne ... - • Une chaise ... • demonde-t -il. Lo jeune fi lle lui e n passe une. Le Doct e ur s'assied face ou ma lade, près du lit. Il a placé à portée de main, !lur la table couve rte de la servie tte p ropre, son a ppare il pou r la t ra ns– fusion du sa ng. Faisant signe à Io femme en lui t e ndant un outre tube de cao[Jtchouc : - • Serre z- le autour d e ma n b ras, lui dit- il, vous l'e nlèvere z à mon signal... » . li b ronche le tube de l'a ppareil sur l'aiguille enfoncée dons I~ bro:; du ferm ier et sur ceJle qu'il va e ntre r dons le sie n. Puis, d 'un geste ne t, il en fonce ce tte a igu ille dons Io ve ine de son coude. Sa main ne trembie pas... La fermiè re, toute pôle, ainsi que sa f ille, bouche bée, regardent... Le nte me nt, le docteur Nerval oc1ion ne Io pe tite pompe sur laquelle se trouvent bro nché!> les d e ux tuyaux·. Lorsqu'il a spire, son >a ng · cou– leur rouge for;icé e mp lit Io seringue. Il fa it foire a lors de mi- t our o u p iston et cha sse cP sang dans Io veine du blessé. Mé.thodique ment, il continue, comptant le nombre de coups e t surveillant les réa ctions du blessé. Quand un peu p lus d 'un qua rt de lit re de sang fut a insi injecté da ns Io ve ine du fe rm ier, le Docteur e nleva 1·a ig uille de son bras, desserra le ga rrot, passa un t a mpon d 'é t her sur Io piqûre e t d éga gea de mêm e le b ra s du b lessé . Aux pomme ttes de l'homme, un sang p lus vif passa it, le pouls s'ét a it régu lc.risé, Je resp iration se faisa it p lus calme... Tandis q ue le docte ur Ne rva l, un peu pâ le , re me t ta it son veston. - c Ça va, d it-il... Je vois maintenant re– faire le panse me nt de Io jambe ; évide mmeri+, ce lle-ci est pe rdue, mois o n pourra sa uvP: la vie de votre ma ri. Preriez ma sa coc he, con t i– nuc- t -il en s'a dressant à Io ferm ,è re , voi.;s y trouve rez un flacon de cog nac ; faites- mo i un g rog. Ce la ira bie n.,. A ce mome nt, on frappe à fa porte : - • Entrez... l> , d it Io fe rm ière. Un h omme parut sur le se uil. - • Ah ! c'est Albert, celu i qui es t allé o u– devo nt de vous, Docteur. Entre, A lbert... > Pencllë s1u · blesse qui ~emble incu1h ci<:nt, le Docteur' rti{lëclut. trop t ôt . Comme nt ça vo- t - il? , ques– tionna l'homme e n franch issant le seu il. Bien, ré · pon dit le Docte ur ... Et en bas, Io li– gne es t -elle répa – rée? l> 4 Oui, Doc– teur, j'a i téléph o– nê à votre femme pour la ra ssurer ; le courant pa sse ma intenant. Vous pouvez allumer... De fait, Io la m – pe électrique brille qua nd Albert t our– na le bou ton. - • Et Io t e m – pê t e? s' informa le Docte u r. - • Elle b a isse, le vent est moins fort . Ce n'est pas - c. Bon, a lors, je vo is pouvoir redescendre tout de suite . Vous m'accompagnez dès que j'ou rais fini Je pa nseme nt ... - 4 C'est p ou r ça que je suis ve nu, Docte ur, ré pc ndit J'homme . Ça m'ennuyait d e. vous a vo ir laissé mont er seul. • - ci: Ah ! soup ira Io femme ; si tu sava is, Albe rt, ce q u'a fait le Docteur... Ce lui-ci se re tourna en souria nt , un doigt sur les lèvres : - < Chu t ! nous n 'avons ' p a s le temps à e bava rde r. Aide z- moi... Dès de ma in il faudra desce ndre vot re mari à Io Clin ique de G... Je p rév ien dra i le chirurg ie n... l> . Une h eure p lus tord, le Docteur Ne rval, son devoir remp li jusq u'a u sang, redescenda it ve rs le bourg... He rbé. - Ohé Patrick ! Viens vite au port ! Il doit y avoir quelque chose, c'est plein de monde ! Celui aua uel s'adressait cette phrase, Patrick Gu~noué était un robuste gar– çon de quator ze ans, bronzé par le vent mar in, les cheveux au vent et le r ire a ux lèvres. · Ajoutez à cela deux yeux bleus, d 'un bleu sombre comme celui de la mer profonde, et vous aurez le portrait d e Patrick. Son père était parti depuis un mois p our Terre-Neuve avec tous les hom– m es du v illage et Patrick; trop jeune J:?OUr embarquer, était resté à Landir en avec sa mèr e et ses quatre sœurs. D'un bond, il fut sur la grève avec Yvon le fils d'un voisin, le meilleur ami des Guénoué. - Oui, c'est vrai, c'est noir de ·monde ! Peut-être a-t-on tr ouvé une épave? - Non, il n'y aur ait pas le maire ! - Allons-y, nous verrons b ien ! Les deux amis se dirigent r apidement vers le por t. Toutes les femmes de Landir.en sont là, parlent et crient par petit s groupes, désignant du doigt une barque qui sem– ble dans une situation désespérée sur la mer démontée. Elle ·monte, se soulève, apparaît un court inst ant à la crète d'une vague, pour disparaître ensuite dans un creux et ainsi de suite. On voit le tr onçon de son mât, brisé lfean-;E'r.tftçoi s 1 dlef d'éqajpe 1 Penchés sur Io p lus gronde ta ble du loca l, Jecn- Franç"is e t Daniel son t plongés dons un mystérieux t rava il. Crayons de coule ur et boite d 'aquarelle, encre de chine e t jou rna ux décou – _oés s'éparp illent a utour d'e ux, t a nd is que se mult ipHent, sous reurs do igts, d'ê nigma tiques enluminures . Absorbés por leur t âche, les de ux g a rçons n 'o nt p as ouvert la bouche depu is plus de douze minu tes, ce qui, mê me pour des chefs d 'équipe, est u n fa meux record ! Une excla– m ation de t riomphe échoppe enfin à Daniel : Ça y est, mon vieux, et p our du réussi, c'est du réussi... o. Jea n -François, en clignant les yeux, examine les chefs-d'œ uv re : a Oui, Y o pas, ça <D de l'allure, i !SI devrait les o ctcro.. Z im boum boum... Hurrah ! Z im boum boum ... depu is plus de vingt minutes, chants e t rires, cris e t m us iques b izarres s'en von t e n cascade par-dessus les murs de Io Chré tien té, réve iller les échos de toutes les mo isons d u vois inage. On a vu successive ment défiler dons Io petit e rue des gors chargés de costumes hé t éroclites, de chefs d'équipe affairés e t rapides, des bondes de garçons a ux mines réjouie~ et pu is, finale– ment, endimanchés, ra dieux, émus, des quantités de personnes qui jamais encore n'avaient fran– chi le seuil de Io Chrétienté. Le vieux père Ru to qui, ja mais de sa vie, n 'a pu sourire à gcn~ n i choses, bougonne sur le pos de sa par une vague, guement sur le s'agrippe !... et l'on distingue va– pont une forme qui Les exclamat ions se succèdent. Il faudrait ·sort ir le canot ! - Les pauvres ! Si c'était un de chez nous ! On d irait la « Maryvonne >) de Kérédent ! - Le canot ! Il faut sortir le canot, ou bien ils sont .pei::dus ! Le canot c'est à L andiren la barque de sauvetage; c'est-à-dire une grosse barque montée par huit rame1;1rS' et qui sert à ramener au r ivage les ·"nau– fragés en péril. __: C'est bien beau de ·sortir le:: canot! Mais qui le montera ! Tous les hommes ; sont [ ( partis pou r la grande '-" pêche. -e: Il ne reste plus que ;......_,.-. des femmes, des enfan ts ,,__.. - -- ou des yieillards ! - ·/. ~' Et , la-bas, la pet ite ~ barque lutte désespéré– ment. Une même angoisse étreint t ous ces cœurs de femmes. Elles savent mer ne rend qu'elle prend ! que pas la ce La « Sainte-Marie-des-Flot s » est sor t ie. Ma is au moment d'embarquer, on s'aperçoit qu'il manque le barr eur. Qr le barreur, mes enfants, c'est celui qui dir ige la b arque et je vou s assure que ce n 'est pas facile !... Et si l'un des sept se mettait à la barre, il n 'en restait plus que six pour mener une barque de huit ! C'était impossible. Il fallait absolu– ment tr ouver quelqu'un. Les hommes se regardaient, indécis. Le temps pressait. L a barque lutt ait toujours. Tout à coup, de la foule, une petite voix jaillit : - Pourquoi pas moi ? Je sais gouverner. - Tu es fou, Patrick, t u es bien trop jeune ! - Trop jeune ! Moi ! J 'ai quatorze ans ! J e suis presque un homme. ! Et je n'ai pas peur ! Vite, embarquons ! L'un des hommes re– i· garda le gosse, le vit so– . !ide, bien musclé, lut le cour age dans les grand s yeux bleus et d it : C'est bien, petit! Embarquons. Elles pensen t à leur s ______.....,-...__............... - Sainte Anne vous pr otège ! cria une voix et toutes les femmes ré– pétèr ent : Que Saint e Anne les proti~ge ! Et maris, à 9.eurs fils, à tous ces marins qui comme celui-là sont par– D'•m t ond, Pu-tric/; fut s111· la ur~•·•··· tis joyeux et qui peut-être comme lui.. Mais un enfant est parti vers Cor– gat pour chercher des hommes... s'il y en a. Cor gat étant à l'intérieur du pays, peut-être aura-t-on plus_de ch an– ce ! Enfin, les voilà! Ils sont sept. .. P as un de plus. Tous marins amateurs. Un étu– d iant , un P arisien en vacances, deux ouvriers, un soldat. deux ferm iers ! Ils saven t r amer, c'est l'essentiel. cher... - Bon, y e n a a sse z: pou r aujourd' hui, on continue ra un autre jour... Appelle les ga rs, veux- tu ? " · Comme une flèche, Jean- François est pa rt i à t ra vers Io cou r et les selles où s'affairent toù jours, dons le feu des dernières répétit ions, les Cœurs Voillonts de Io Chré1 ienté St -Jean. Quelques secondes p lus t a rd , il repa– raît, troÎnant par la ma in u n Roger empêtré dons sa t unique de Ph a risie n, un Robert tout endolori d 'avoir représenté t rop longtemps le voyageur b lessé et Maurice Ple ix, Je chef d 'équ ipe Cœur d 'Or de la St- Michel. Daniel s'est levé d'un a ir très solennel : et Les gars, on o besoin de vous. Jean-François vous a déjà expliqué cc qu' il sovoit do Io bonde des XxX. porte : Ah, ça ! qu'est-ce q u'ils milotcnt e ncore, les Cœurs Vailla nts ? - Comment , voi– sin, vous ne savez donc pa s ? hurle à son oreille Madame Baton, l'épiciè re du coin, mois c' est une fê te qu'ils ont organisée pour lcG familles pauvres qu' ils visitaient Io semaine pa ssée. Même que i'oi prêté t ous mes rideaux en cre t onne et mes derniers reste s de bonbons pour les y aide r. De bra ves gars, alle:z:, ces petits, faudrait qu'il y e n a it beaucoup comme ça e n Fronce... n , Mais Mme Baton ne peu t continue r plus longtemps son d iscours, cor une a mb re vient de se g lisse r derrière elle, u ne ombre qui se tenait immob ile p our l'écouter, 1 d ans le fond de leurs cœurs les m amans ajoutaient : Surtout le petit ! 0 Et la « Sainte-Marie-des-Flots > s'é– la.,ça dans· la mer. Ce fut une rude bataille ! - Vingt fois la bar que fa.illit chavirer , v!ni;t fois grâce à la maîtrise de « l'hom– me » de barre, vin gt fois elle se re– d:-essa. Aujourd'hui, nous avons dé ddé de commencer ensemble une g rande campagne pour c:ssoyc r de · les conq uérir. Çd' n ' ira pas tout $Cul. Ça durera longtemps. Mois vous conna issez no5 devises, fa udra que ça vicnna, tôt ou t ard... Pour commcnca r, on a combiné tou t u n plan. Rcgorde.x un peu... " · Un sifflement d 'adm i– ra tion s'échappe à la _lois, sur tous les t ons de le g a mme, des t rois têtes penchées su r Jes dessins. Jean - François complète les explica t ions : u On en fera d'autres. Faudra s' a rranger pour qu'ils se trouvent un peu pa rtout, soun les yeux des gars 0 de Raoul... Ça finira sQrement por les intrig uer] et alors... • · Les tro is g e rçons a pprouvent énergiquement, une lueur d 'odmi- depuis p lusieurs instants, e t qu i, tout d'un coup, est ent rée a vec fracas dons la boutique ... a Là, .là, bie n pressé, cc client, permettez que ·J'aille voir ? 1>. Pendant ce te mps, les allées et venues ont con t in ué dons Io ru e et un petit gars s'est mêlé aux familles qui ne cessent d 'arriver ; un peti1· gars q ui s e fau f ile t imidement comme s' il cra ignait d 'ê t re vu et qui ne perd pas u n pouce du spectacle.. Tro is fois déjà il est passé devant Io porte g ronde ouverte de Io Chré– t ienté - tro is fois :1 a essayé de jeter, sans en avoir 1a ir, u n cou!J d 'œ il furtif sur Io cou r tou t·e décorée de g u irla ndes - e t puis, il s'e n est o llé, so ns se douter que là -bas, derrière la « La Sainte Vierge sembla it défen– dre le frêle navire contre 1es éléments en furie ! » Il n 'y avait qu'à voir comme il coupait les h autes vagues et avec quelle sûreté il se r approchait de l'épave. Un canot à moteur n 'aurait pas fait m ieu x ! Q Oh ! Ça n'allait pas vite ! et P atrick, trempé de la t ête aux pieds, crispé sur sa barre, devait avoir quelquefois envie de pleu rer ! Mais c'étaft un v r ai breton ! Il a tenu jusqu'au bout ! Ils · ont pu s'accrocher un moment au bateau des n a ufr agés, pour leur permett r e de sa uter dans le canot, et ils sont revenus à L andiren après avoir lutté « une heurre et quart n, vous en– tendez bien : une heur e et quart ! P at rick s'est alors évanoui de fatigue dans les bras de sa maman qui n'avait appris son départ que quelques instants après. E t les sep t hommes ont dit qu'ils n'avaien t jamais ·vu pareil courage chez un enfant ! 0 P atr ick devait toute sa vie se mon– tr er digne de ce jour-là. Il mourut pen– dant la guerre de 1914 sur le cuirassé où il servait crânement la Fr ance... et ajouta, d'une voix qui t remblait un peu, le vieux marin qui m'a raconté cette histoire , vous pouvez me croire, car j 'étais à "côté de lui... J e m'en suis tiré... lui est mort... C'était un.fier petit gars... X YZ. ystè 1 t te e 1 ra t ion a u fond des yeux. Ces qro nds, qu a nd même, quels types !... Mois Jean-Fra nçois a repris ses explication~ : " Alors, c'est entendu, vous vous chargez cha cu n d' un message ot vous vous débrouille: pour q ue Pierre, q ui est da11s vot_rc cla sse, los trouve à un mo me n t ou à un outre. - Et cc n'est pos t out, comp lète Daniel, lire ces mcssaga.:; ne !luffirait pas, Il fa ut q u'e n mê me tcmp!i, rien qu'à vous voir, Pierre com.. prenne cc que c'"cst que des Cœ urs Vaillants... moi, je me ch arge d ' André. C'est compris ? - C'ost compris, chef, tu peux comp ter sur nous... " · Et les g a rçons de s'éclipser en esca– lada nt ta b les et bancs, pour bien montrer le ur en thousiasme ... vitre de l'éoicerie, Je regard mécha n t de Raou l le suivait d ons l'ombre ... Car c 'est Raoul qui, son soc à provisions ou b ras, vient d'e n l·rcr chez Mme Baton... c'est Raoul qui, à la vue de son complice attiré p ar les mystérie ux a pprêts de Io fête C.V., est devenu tout à ceup pôle de rage... de Io poche de Pierre il a vu tomber u n pap ie r froissé qu'il a rcmass6 ove précipitation et maintenant, après l'avoir lu d'u n t rait, une lueur de colère au fond des yeux, le chef de Io bonde des XxX,. sa ca sqL1ctt c enfoncée sur Jes yeux, s 'en va d 'un pas norve ux en bougonnant d 'incomp réhensibles menaces. · (A ·su ivre) . Jean-Bernard .
Made with FlippingBook
RkJQdWJsaXNoZXIy MTcyODU=