Cœurs Vaillants 1941

Lo piste courait étroite, sinueuse, à travers le bois do manguiers où le soleil couchant jetait de magnifiques traînées d'or. Avec des cris d'effroi, perruches et colombes s'envolèrent en grand tumulte, ale rtées par le passage de deux cyclistes lancés à fond de train sur le sentier. Dans un joyeux éclat de rire, le premier des deux garçons, Robert Clairvol, se retourna vers son camarade sans pour autant ralentir son allure. - Ohé l Choto Sol l tu entends les per– fuche•? - Oui... bien sOr, elles ne sont pas habi– tuées à voir de telles machines. Mais presse Robu t f ilant fraye un passaae arriva au pied du manguier... l'allure, Robert, il se . fait tard. Si tu es bientôt chet toi, j'ai à parcourir un che– min beaucoup plus long avant d 'être à la maison. Camarades de collège à Saint– Fronçois Xavier de Lucknow, dons les 1ndes mystérieuses, Ro– bert Clairval, fils d ' u n ingénieur fronçais, et Chota Sol, Indien de haute caste, pas– saient leurs va– cances non loin l'un de l'autre et rentraient ce soir– là d'une excur– sion à trovers Io forêt hinddue, où Robert avait vau- lu s'initier à Io vie des pionniers. Soudain, une plainte partie de quelque coin ie Io forêt, non loin de la piste, fit sursauter ~obert qui freina brusquement. Choto Sol eut à pe ine le temps de bloquèr ;es freins, il heurta la bicyclette de Robert et, faisant une pirouette, tomba dons les broussailles. - Ah ça, tu es fou ! grommelo- t-il en se relevant tout meurtri. · Mois déjà Robert Clairvol, son couteau à Io main pour trancher les lianes et se frayer un passage dans le taillis, s'était enfoncé sous bois et parvenait rapidement près d'un man– guie r ou pied duquel é tait é tendu un jeune garçon de l 2 ans environ, un Indien adossé à un fagot de bois mort et serrant à deux mains sa jambe gauche. - C'est toi qui os appelé ? demanda Robert. . L'enfant inclina la tê te, et parlant un anglais millé de mots indiens, il expliqua qu'il était tombé en récoltant du bois mort, et que sa jambe lui toisait horriblement mal. · - Eh bten ! Cloirval, que fois-tu t appela Cho ta Sol. - Par id, Chota Sol... arrive... j'ai trouvé un jeune garçon qui s'es t blessé... A travers les bronches, Chota Sol chercha du regard celui" dont porlait Robert Clerval. - Peuh ! dit-il en faisant la moue, c'est un • Mali • (1 ) . Tu ne veux pas que j'aille le toucher ! - Mais, protesta Robert stupéfait, on ne peut pas le laisser là... - Ses parents vie ndront le chercher. Et puis il fait presque nuit. Je dois rentrer. · Viens. Tu n'auras qu'à faire pré venir chez · lui... Indigné, Robert ClairvaJ répliqua : - Eh bien ! vo-t -en si tu veu11... avec ton pré jugé de cast e. . Moi je reste e t je me dé– brouillerai tout seul. - A ta g uise ... Au revoir ! Ramassant sa bicycle tte, Chota Sol, sans se retourner, et de fort mauvaise hum! ur, dis– pa rut dons la forêt. Robert Cloirval se pe ncha sur l'enfant, le prit dans ses bras. - Est-ce que je te fois mol ? demonda-t-il. L'enfant sourit courageusement. - Pas trop, dit- il. - Tu habites loin d 'ici ? - Non, dans une pe tite ferme où ml!ne le chemin q ui prend à droite sur le sentier. Ce n'est pas très loin de ton bungaJo.w. - Tiens ! tu m'e connais donc ? - Otii. Ton papa o soigné le mie n un four, et.. je t'ai vu souve nt p asser dons la for~t. - Mois mol je ne t'avais pas encore vu. Pourquoi ne pas m'avoir appelé ? - Oh 1 toi, répondit mélancoliquement le petit, tu es un • Sahib • (2) et moi je suis un c Mali > , un fils de jardinier. - Ça n'empê ché pas que nous soyons frè– res... Allons, courage, nous voici au sentier. Je vois é tendre ta jambe sur mo bicyclette et te conduire doucement chez toi. Dis-moi si je te fais mol... Avec prudence, Robert guida son petit blessé vers sa ferme. Le soir tombait. Le soleil embrasa l'horizon et toutes choses d'une lumière rouge . sonsi et d'un seul coup la nuit tomba... Quelques ins– tants plus tard, Robert Clairvol arrivait à la petite ferme où demeurait le jeune Riki, c'est ainsi que - l'enfant lui avait d it se nomrrtêr. • - Momon ! Viens vite ! Je suis tombé d'un arbre et c'est le jeune Sahib du bungalow qui m'a ramené ici. Robert Clairval, son rôle de sauvete ur ache– vé, voulait se hôter de prendre congé , pensant à l'inquié tude de son père s'il rentrait trop tard. 11 déclina l'offre du père de Riki s'offrant à l'accompagner sur Io piste, - C'est inutile. J'ai ma lampe électrique de poche et je connais bien le chemin. Au revoir, Riki 1 - Ecoute, dit encore l'enfant, je voudrais te donner quelque chose. Vois, j'ài là une paire de pigeons que papa m'a donnés. Ce sont des pigeons voyageurs. J~ les aime ~ien. Ils cou– chent là, dans ma chambre. Je veux t 'en don– ner un. Emporte-le. Il te fera penser à moi !... En vain Robert Cl9irval voulut refuser, disant que le piQeon l'encombrerait sur sa bicyclette. Le jeune Indien, excité par la f ièvre, n'en voulut ·pas démordre et Robert dut emporter, en souvenir de lui, un jeune et joli pigeon qu'il plaça soigneusement è l'i11.térieur de sa veste. • Pope doit être · terriblement inquiet •, pen– so-t-il tout en suivant à bonne allure le sentier qui menait à sa maison. Depuis Io mort de sa femme, Clairval aimait venir passer quelques la solitude de sa maison de repos, l'ingénieur jours dans en pleine forêt, avec son unique enfant et un vieux se rviteur indou, Béror. ·En approchant de sa deme ure, Robert aper– çut de loin, sur la vé randa du bungalow, la haute silhouette de son père allant et venant, scrutant Io route. il se hâta de le rassurer en lonçont un joyeux • Ohé 1 • du plus loin qu'il le vit: Sautant à terre, tout essoufflé, il résuma l'histoire du jeune Riki. En vain, lt fe-untJ homme 1 1 outut refwur, il dill emporw· le piaw n... Allons me voici plus ~renquille, dit M. Cloirvol. Seulement je suis ennuyé d'un outre côté. Je viens de rece• voir un télé– gramme me si– gnalant' un oc– cident de chau- dière à l'usine. Ma présence y est nécessb ire. Je comptais t'e mmener avec moi. Pqr malchance la voiture est en panne et je vais êtr~· obligé d'emprunter' ta bicycle tte. Tu sois que j'ai dO e nvoyer Béror chercher diverses fournitures urgentes. Il ne doit rentrer que demain. Ce qui m e préoêcupè, c'est moins d'interrompre notre vie de c Robin– so ns • que de te laisser seul à Io maison cette nuit... - Ne craignez rien, papa, je n'ai pas peur, et puis vous a vez des documents précieux ici, il fout bien quelqu'un pour les garder ! Soyez tra nqu ille, il ne m'arrivera rien... d'ailleu rs il y a le té léphone... - Cela me rassure un peu. Je voulais foire venir le fermier chez qui tu é tais ce soir, mais il sera occupé p ar l'accident de son f ils. Vrai– me nt nous jouons de malchance. Les ouvertures du bungalow sont solide– me nt fermées. Je coucherai au premie r é tage . t[!t à la moindre alerte je vous té léphonerai à l'us ine ... - Surtout n'hésite p a s à oµpe le r... D'ailleurs je rentrerai peut-être dès ce tte nuit. Au re voir, Robert ... A. QUELLE HEUREDIRAS·TU CETTE SEMAINE, ------... 11.:ne dizai ne de chapel et POUR T'UNIR A LA GRANDE NEUVAINE DES ENFANTS DE FRANCE A LA SAINTE-VIERGE? L'heul'e est ga ,.o..• l!<>Ue patrie a b a•oln de l'eUort, dd la priàre, du sacriflco d e toUll mes · ~lll,,Cœ..,, V..Waat, e omm.e•t vaa 0 tu di;>oa dre à eon cppel? Il.AVENTURE FANTASTIQUE D'UN GARS DE 12 ANS Nous ne sommes pas des enfants sages Quand j'éta·is petit, j'étais ce qu'on appelle un fameux chahute ur ! Ça a même failli me jouer de bien Yilains t ours. lorsque j'avais accompli quelque exploit pendable, mon poune Papa se demondcrit pourquoi il avait un fils a ussi turbulent et ma chère Maman me disait d'un ton plein de reproche : « Alfons, Jeon, sois sage 1 ». · · Sois sage..• les parents Yeulent toujours que leurs enfants soient sages. Ils ont raison, bien sûr, YOS chers pa·rents. Mois a u ~nd, q•J'est-ce que c'est qu'un enfan~ sage? Est-ce que c'est un bon petit gor~on bien tranquille, qui ne dit rien, qui ne crie pas, q ui ne court pas, qui ne grimpe .pas dans les arbres, qui ne déchire pas sa culotte et qui, pour L'e Jour de 1' An, demande timideme nt à son Oncle Pancrace de lui acheter des cohiers et un pupitre ? Si c'est cela, je suis sur que l'OUS, les Cœurs Vaillants, YOUS n'êtes pas des enfants sages. Mois ce n'est pas cette sagesse,.là qu'on dema nde. Ce qu'on vous demande, c'est d'être DES GARS QUI ONT DU CRAN. Les grands héros cie notre poys, -ceux que nous a dmiron» llt qui Yous servent de parrains d'équipe, Turenne, Baya rd, Charcot... n'étaient pas, lorsqu'ils étaient petits, de timides garçons tranquilles et silenCieux. La plupo.rt ét a ient remuants, casse-cou, audacieux; Mois, ils aYaient à peu près tous les .même~ qualités : ils étaient LOYAUX, GENEREUX e t TRA– VAILLEURS. C'est à cela qu'on reconnaît fes yrais CŒURS VAILLANTS. Pour refaire une France plus belle, on n'a pas besoin de bons petits garçons bien sages• . Pour refaire une France plus belle, on a besoin : De garçons FRANCS, qui Y<>us regardent bien en face et dont « jamais mensonge ne passera la gorge >1 ; De garçons GENEREUX, t'est-à-dire de gars qui ne diront pas « moi d'abord n, mais qui penseront d'abord à leurs frères et à leur poys; ~e garçon~ TRAVAIL~EURS qui saYent qu'on n'est pas sur la terre pour courir apres les papillons e.t qui se ra·ppelleront que leurs aînés ont connu Io défait e pgur ayoir trop chanté : « dans la vie, faut pas s'en foire ». Deux . fois en Yingt ons, il a fallu que les popas et les grands frères se fèyent et tombent par milliers et par milliers. DeYant tun pareil sacrifice les petits ne peuYent pas rester inactifs, « sages comme ' des images n. Une immense armé11 de PETITS GARS QUI ONT DU CRAN s'est levée. Elle Yeut être digne des grands frères de tous les Mouvements :· jocistes, jocistes, scouts, éclaireurs, compagnons, etc.•• C'est l'armée des CŒURS VAILLANTS DE FRANCE. Si tu veux en être, petit frère qui lis ce journoJ et qui o entendu mon appel, procure– toi Yite le petit line : A TOUS LES GARS QUI ONT DU CRAN ! Il t'apprendra ce que nous sommes et ce que nous youlons. Et en route pour la plus belle aventure ! Combien de temps Robert o-t- il domni ? Il ne p eut tout d'abord s'en rendre compte. Au rêve qui remplissait son sommeil vient de se mêler, insensiblement d'abord, puis de plus en plus insistant, a.n bruit étranger à ce rêve, un grincement , régulier qui t rouble le sommeil du jeune garçon. Le rêve s'est évanoui, mois ce bruit extérieur · demeure et devient plus im– portant. Brusquement Robert Clairval s'est a ssis sur so n lit, l'oreille à J'écoute. Pas de doute. Le bruit qu'il entend est ce lui d'une lime qui ronge les barreaux de fe r protégeant le bureau de son père. Le cœ u r battant, Robert s'est levé et , sans bruit, ouvre la fenê t re. Il distingue au clair dé lune deux silhouettes, deux o"mbres noires qui se re laient pour poursuivre le travail qui doit le ur donner accès dons le bungalow. A pès de loup , Robert descend au salon, ga g ne l'endroit où est placé l'a ppareil télépho– n:que et tourne fébrilement la manivelle d'a p– pel... il a ttend... puis pâlit... Bien des fois il o télépho né ... e t ce tte fois il n'entend aucun des bruits habituels... Jo chose est claire, les fils ont é té coupés. Sons bruit, Robert a reg_a gné sa chambre muni des précieux documents. Soudain un fro is. sement d'ailes, tout p rès · de lui, le fait t res– saillir. Qu'est -ce donc ? Ah ! c'est le pigeon voyageur de Riki... e t t out à coup une idée jaillit du cervea u de Robert : sa dernière chance. 1 Vite, il saisit un crayon et, camouflant soigneusement sa lampe é lectrique, il rédig e un bref appe l : Des cambrioleurs essaient de forcer les fenêtres. Suis seul. Dema nde sec:ours. Robert Clairvol • . Robert roule le pap ier, il l'a ttache à Io patte ga uche du p igeon et , plaçant ce lui-ci sur le bord de la fenê tre, il l'embra sse e t le . pousse dèhors... Un instant Io bête hésite, puis, per– dant l'équilibre, plonge au-dessus des hommes, se ressa isit et disparaît à t ire d'ailes~ A la ferme, Riki passe une nuit blanche, tant so jambe lui ·toit ma l. L'enfant se débat dans des cauche ma"rs incessants. Tout à coup un choc léger à la vitre de sa cha mbre le fait tressaillir. - Momon, on frappe. Debout ou prerT'ier appel, la maman de Riki a ouvert la fenêt re. Un pigeon entre e t volette un instant a vant de se laisser prendre. - Oh ! c'est le pigeon de Robert ! Il l'aura laissé pa rt ir... et il est revenu chez nous ... Viens, mon petit p igeon... Là... repose-toi un peu... Oh ! mois, qu'est-ce que ce la ? En caressant Ja bête, Riki vient de t rouver le pa pier de Robert. - Maman, un papier... A peine l'appel ou secours de Robert est-il lu que le papa de Rikî s'opprilte à partir. C'est un homme solide, soup le, q>nnoissont à fond Io forêt . Rapidement il s'est équipé et il disparaît dans Io nuit, tondis que Riki, anxieux, prie Die1,1• pour que le secours arrive èl temps. Dans l'ombre de s e s persierines, Robert Clairvol suit de prè s le travail des cam– brioleurs. Un deu– xième barreau o é té scié , il e n– te nd le crisse– m ent d'un • cf1a– mant • sur le verre, le claque– m ent se c d 'une vi– tre qui soute, le g rincement d' une espa gnolette qui tourne... - Ça y est ... murmure l'un des hommes, n o u s voici dans Io pla– ce... ga re au gar– çon qui couche .._.==-=....-==="" ou premier. Le mieux serait de le supprimer tout Anzieusement. il tcoute le ~Il m vste'ru:us qui trou.t>le son sommeil... de suite. Va s-y pendant que je veille, par la fenêtre. ou cas où il scut eroit ( m lte page 5) (1) Indien d'une c;:iate méprl!iée. (2) " Snhib ' ' : Seignour blanc. parcourent royaume, i:iillant et brûlant tou t sur leur passage. Aujourd'hui, 15 juin 1338, la petite ville de Cressy-sur -Loir est assiégée par l'armée d u Comtë de Bradfor t. Aussi la boutique de Maît re Taber– neau , le rôtisseur, est-elle pleine de gens qui q uestionnent , discutent et mènent grand tapage. C'est qu Maître Pierre Taberneau joint à sa fonétion de rôtisseur celle, p)us guen-ière, de chef de la Milice cressoise ; et, comme tel, il doit être le remier iruo ·mé. - Est-il vœai,. Maître Pierre, qu'ils sont plus de ~ix mille ? - C'es.t vrai, Dame Renaud ! C'est malheureusement vrai ! Que peuvent fafre deux cents bourgeois contr e six mille soldats bien armés ? - Est-il vrai qu'ils ont avec eux un feu qui ne s'éteint jamais ? - Le feu grégeois. On le dit, Mère Anne. - Et qu'ils ont aussi d 'énormes ma– chines de guerre ? - Hélas ! oui, Messire ! Des machi– nes qui lancent des tonneaux d 'huile bouillante et de pierres sur les mu– r ailles. Et comment cela marche-t-il ? Je ne sais exactement. Il paraît qu"il y a un jeu de cordes et de cour- A-â -â -tchoum !... Impét ueu x, sonore , irrésisti– ble, l'éternuement a retent i sous Io voûte hu– mide de Io caverne. Jean-François o eu beau en– fouir son nez dons son écha rpe, il lui semble que tous les échos de la grotte ont t remblé ·sous le bru it . Atterré, le Cœur Voillont reste un instant immobile dons l'attente de Io catastro– phe. En basf dons Io grotte, les écla ts de voix se sont faits plus bruvonts... Io bonde de:; XxX discute violemment, mais aucun bruit de pas ne retentit sur les rochers... Ruse ' Re– tord?... Jean- François ne le saura jamais cor, pris de p\)ur brusquement , il s'est retourné d'un Devant le regard péné trant de son chef d 'é– quipe, Marcel a détourné léoèrement Io têt e . Mois Jean-François insiste : - Dü;, Marcet, nous sommes bien d'accord, n' ost-cc poc ? Raoul et sa bande, il fout lcc Gvoir, maie f'O'.Jf les conquérir à Io façon des C. V . Tu sais cc que ça veut dire ? Marcel o un geste d'impat ience : - Mon pauvre Vicu11:, tu ne te rends pos como"o ! Avee des gars comme ço, on en ou– vai~ pour des année!:i... sons compter tout cc que ço nou!'.: promet d'histoires... Si on s'y prend comme s:a , on Re ~cro fomois tranquilles.. ~ roies... Ah ! maudite soit cette nu it où J;armée est arr ivée sous nos murs ! Il faut se rendre ! Non! jamais! Jésus ! Sainte Vierge, protégez notre cité ! Qu'allons-nous faire ? - Je ne sais, Mère Anne ; pour le moment je cour s aux rempar ts. Sur– tout, Thierry, sois sage. Ne cours pas du côté <les tours, il y a du danger. Ces dernieFs mots s'adressen t au fu– tur seigneur de la rôtisserje, au rejeton de la famille Taber- neau, charmant garçon– net d'une douzaine d 'années, blond comme les épis mûrs, avec des yeux de pervenche vifs et pétillants, un vrai lu– tin... Un vrai démon plutôt, disait Dame Ta– berneau, il est toujours qui a u r a ien t fort ·inquiété dame Taber– neau si elle se fut trouvée là ! Tou jours est-il que le garçon rentra exactement à l'heu re pour déjeuner, chose qui ne lui arrivait qu 'une fois par an au maximum. L'après-midi se passa sans alerte, mais dès la fin du souper, Thierry partit comme un trait en emportant un objet long soigneuse– ment d issimulé sous son pourpoint. 0 Minuit ! Tout dort ! Les tentes an– glaises s'étendent de– vant les murailles. Les immenses machines du Comte de Bradfor t dres– sent leurs grands bras qui se découpent sur le ciel. Un pet it croissant de lune semble ricaner au-dessus du camp. Les sent inelles angl ai– ses se sont endormies, appuyées sur lèurs hal– lebardes. - Que c r,, a i n– d raient-elles ? sur les remparts à jouer aux · sold ats et Je ma– gister ne l'a vu qu'une fois à l'école de tout le mois!... Figurez-vous qu'il A ln 11uit tomhle, Thif!''''V 1inrtif ro1111nt! 1we flPr he, em1 ortnni un. of,jel tonu soio11e11.\emcnt rlisûm ulé sous MJJI Z,OtLJ']OÙU. a été élu chef d 'une bande de garnements et q u'à eux six ils ont fait autant de sottises que tous de la ville. Pas un bruit ! Tout repose. Soudain, un léger grin– cemen t t rol:lble le si– lence. les gamins 0 Thierry avait écouté avec attention tout ce qu'avait d it son père, et dès que celui-ci eut le dos tourné, il fila rejoindre ses camarades. Un long conciliabule eut lieu derrière la m aison du b ailli. La discussion se termina par des Montjoie ! Noël pour Thierry ! seul bloc et, prenant ses jambes à son cou, il se d irige tête baissée vers la sortie de Io ca– verne... La neige qu i g lisse sous ses oas, l'air froid q ui cingle son visaoe, la cruelle morsure des branches glacées sur ses mains, rien ne re– torde sa course. A perdre hale.ne , le chef d'e– quipe dévoie le sentier comme si toute Io bonde des XxX éta it décha inée su r ses pas... De bonde des Xx'X pourtant il n'est pa s trace è l'horizon. Sans doute parce qu'ils étaient trop occupés à se dis!)uter, les comf.51ices de Raoul n'ont pas soupçonnf Io présence insolite de Jeon– Fra nçois et celui-ci, peu t peu, ra lent it sa folle . Cette fois, c'est ou tour de Jeon-Fronçois de bondir : - Tranquilles ? tranquilles ? non, mois dis donc, tu t'ima gines qu'on n'est fait C. y. pour être tranquilles ? - Non, bien sûr, mois enfin, avec l'équipe ... - Eh bien, l'équipe justement ile en sont, ce ux-là aussi, tu · le sa is bien. Voyons, Marcel, c'est pas possible que tu nç sois pas de mon avis, toi ? Cet te fois, Marcel n 'o plus protesté. 11 o seu· Un garde dort. lève la tête puis se ren- Là-bas, dans la tour d'angle, la Po– terne Ste-Marie s'est ouverte, la lourde por te bardée de lames cloutées s'est entrebâillée. Avec précaution, une téte sort. puis rentre. Quelque mot s à voix basse et six petits gnomes sortent san s brujt, allure. D'a illeurs, voici déjà les oremières m a i– sons du bourg. Là , dons Io rue déserte et froide, une ombre va e t vient Qui se précipite ou de– vant du Cœur Vaillant : cr Jean-François, toi, enfin ! Alors ? " · Avant de répondre à Marcel que sa lonoue faction o transi, Jean- François respire un bon co ur.> profondément : - Ben... i'cn c i vu de belle!> ! - T'en as vu ? Qui ? dis vite... - Lo bonde des XxX, dans u ne grot te en plein bais... ça doit être leur quartier général... - Et y sont combien ? - Trois. lement ott ropé dcns l'ombre Io main de Jcon– Fro nçois et il Io serre vigoureusement sons rien d>re. Un bon sourire détend immédia tement la figure du chef d 'équipe : - Ah ! je ·sovois bien ! Afors, écoute... Tu connais Daniel Laurent, le chef d'éq uipe de la Saint-Pierre ? Il est justement de Io mcme classe que le grand Dédé. Tu vos aller chez lui e t lui demander de venir nous rejoindre dcmoin ou local... M9i, je m'occupera i de prévenir Maurice Ploi11: qui pourra nous aider pour l'outre .•. Jean-François s'interrompt brusquement. A six n ains gris comme la t erre qui les porte. Ils rampent maintenant vers le camp anglais. Les voilà qui passent dans un rayon de lune: Ce sont Thierry , Luc, Georges, Amaury, Guy et Jehan. :Horreur ! Ils ont chacun un long couteau entr e les dent s ! Gare à vous, Comte de Bradfort ! IVIais le comte dort et rêve au beau ti– tre de duc que lui vaudra la prise de Cr~ssy. Pendant ce temps, les six ombres on t dépassé la sentinelle qui rqnfle bruyam– ment. Elles se sont relevées et se disper– sent dans le camp. Et crac ! crac ! les six couteaux se sont mis à l'œuvre pour tranche~-_' .. · les cordes des arbalètes, les courroies des trébuchets et des machines de siège ! Tout tombe en morceaux et Thierry songe : « Tant pis pour le couteau de Maître Taberneau mon pèr e, il en voit de dures ! 1 Et les nains s'affairent , tout y passe. Puis, un à un, ils disp ara issent et à deux heures précises la lourde porte de la poterne Sainte-IVIarie se referme sur eux ; un rire clair et argentin s'égrène ur le camp anglais et une voix monte : « Bonne nuit , Messire de Bradfort ! ». Le lendemain, les troupes anglaises levaient le siège, traînant leurs machi– nes inutilisables... et dame Taberneau s'évanouissait de joie en voyant reve– nir, sale et dépeigné à souhait , son re– jeton bien-aimé ! XYZ . G ens 0 . a Ma rcel a un petit· sifflement ollèqre - Chic, alors, on n'a u ra pas do mal à tes avoir!... Mois Jea n-François n 'a pas l'air convaincu - Pas de mal à les a voir? Qu'est-cc que tu en sa is ? - Cc q ue j'en sois ? Trois devant nous toui;, y vont pas f aire les malins, jo pense ! Sa ns d ire ·un mot , Jean- François regarde lon– guement son second, droit do ns les veux - Qu'est-cc q ue tu a ppelles n les avoir » ? Il ne s'agit pas de baga rre, je pcnoo ? l'horloge de Io petite église, Io demie de six heures vient do sonner. Les deux oorcons t res– saillen t : " Si~ heures et demi, déjà... et Poul? " · Poul, c'est vra i, deva it être là , au rendez-vous, à six heures 0 1..i plus tord... Jcon - Frons:ois p81i t tout à coup. Tout à l'heure, dons Io o rottc, Io bonde des XxX porlo it de tendre à Pa ul u n guet-apens... Si le Cccur Vaillant n'est pas en– core arrivé, ne serait-ce oos parce oue ?... Le chef d'éq uipe n' y tenant plus, saisit Ma rcel par le bras... IA suivre.) Jean. BERNARD.

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